Chef d’oeuvre de la BD – Akira en 10 Planches

Même les fans de Comics aiment Akira – A y repenser, je n’ai jamais rencontré quelqu’un qui n’aimait pas Akira. Pour la plupart des personnes en dehors du Japon, Akira fut la première rencontre avec le monde du manga et de l’animé. Le manga est un travail titanesque et le film est probablement le meilleur animé à ce jour. Il m’a paru donc essentiel d’aborder ce chef d’oeuvre de la BD, pas en tant que fan de manga ou d’animé (que je ne suis pas, voir ma liste) mais plutôt à travers la claque que m’a donné cette oeuvre lors de sa sortie. Sans plus attendre, voici Akira en 10 Planches.

Katsuhiro Otomo

Katsuhiro Otomo en plein séance créative.

Il faut être pas mal tordu pour avoir pondu une BD de la sorte. Otomo a servi le grand public. Très peu connaissait le manga avant l’arrivée d’Akira. Pourtant Otomo était déjà célèbre au Japon pour son travail sur d’autres ouvrages notamment un autre manga appelé Domu (1980-1982). Le travail d’Otomo pré-Akira instaure déjà les thématiques de l’esthétique de la violence, de la destruction, et des pouvoirs surnaturels…

Les inspirations de Katsuhiro Otomo sont diverses. On peut évidemment voir l’influence de Moebius pour la partie SF, mais aussi une influence cinématographique américaine comme Bonnie and Clyde ou Easy Rider. Il y a tellement à dire sur lui, son travail sur Farewell to weapons me scotche encore aujourd’hui.

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Akira et la bombe atomique

La bombe atomique sur Néo Tokyo

1945 – Les largages des deux bombes atomiques ont apporté la peur et l’horreur aux habitants du Japon. En 1982, quand Katsuhiro Otomo publie le premier épisode de la série Akira, les stigmates de Nagasaki et d’ Hiroshima sont encore présents pour cette génération de la guerre froide. Ce ne sera donc pas surprenant que cette dystopie commence par une bombe atomique.

La peur de l’uniforme militaire, des politiciens corrompus et de l’apocalypse remplissent les chapitres d’Akira. Le Tokyo d’Otomo est hanté par les fantômes de la destruction. Les dangers de la science sans conscience.

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L’architecture de Néo-Tokyo

L'architecture de Néo Tokyo

Les lignes travaillées et les points de vue d’Otomo m’ont toujours impressionné. Souvenez- vous, nous sommes en 1982 ! Et même si l’organisation architecturale de la ville de Tokyo est probablement en avance si on la compare à nos structures occidentales, il n’en reste pas moins que le dessinateur est un visionnaire. Les thèmes de la décadence capitaliste, l’impact climatique, l’échappée technologique et la surveillance gouvernementale, tout y est déjà dans cette ville. Présage d’un futur qui nous est maintenant si clair. Les influences se mêlent, le Metropolis de Fritz Lang (1927), le 1984 de George Orwell, le Blade Runner de Ridley Scott, le plan of Tokyo de Tange (1960), les villes de Moebius. Une infrastructure d’autoroutes stellaires et de buildings en compétition les uns avec les autres. Néo Tokyo sera la genèse des centres villes urbains.

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Akira et la violence

La violence d'Akira

La création et la destruction sont au coeur de l’histoire d’Akira. Des gangs d’ados motards font la loi dans les rues de Tokyo. La police se bat contre des manifestants et des terroristes. Le personnage central Tetsuo, se mute en une force monstrueuse, son corps enflant jusqu’à devenir une masse de peau et de liquide. La violence des images dépasse souvent tout ce que nous avions pu voir sur le papier venant d’une BD. Le sang des bagarres entre gangs, le sang de la répression des manifestants, le sang de l’annihilation des terroristes, le sang de la mutation de Tetsuo. Et malgré toutes ces blessures, une reconstruction. Comme si l’auteur voulait montrer à l’Occident que malgré ce sang qui coule, l’Orient semble s’adapter à tout. Et la solution se trouve parfois dans la violence.

J’aime le fait que Otomo ne cherche pas à cacher la violence. Le sujet nécessitait à ce que cette agression soit exposée dans toute la dimension que la BD peut proposer. Il était donc nécessaire de montrer cette violence aux lecteurs, sans pudeur mais avec l’honnêteté de ne pas faire le commerce du gore.

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La couleur

L'arrivée de la couleur dans Akira

En 1982, Akira fut publié en noir et blanc au Japon dans le magazine Young. Il prend de la couleur lors de son introduction au public occidental. Les pages furent aussi modifiées pour la lecture de gauche à droite. En effet, Otomo voulait toucher le maximum de lecteurs possibles. Donc, la couleur a toujours été une source de débats entre les puristes et les fans.

Il faut quand même admettre que la couleur n’a pas été faite par un amateur. Steeve Oliff a été sélectionné directement et personnellement par Otomo, probablement car c’était l’un des premiers pionniers à utiliser un ordinateur pour colorier les comics. Les couleurs et notamment le rouge et ses dégradés ont joué un rôle crucial dans le succès de ce manga puis du film en Occident. Le coup de crayon d’Otomo ne semble pas du tout être dénaturé. Au contraire, je trouve que cette couleur donne plus d’épaisseur au trait et accentue l’histoire de manière admirable.

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Les motos

La moto de Kaneda

Les deux personnages principaux d’Akira appartiennent à un gang de motards, « les capsules », qui sont en guerre avec un autre gang, « les clowns ». La bataille des chefs rivaux, Kaneda et Joker, est interrompu par la police mais déjà cette scène de début montre l’intensité de la chevauchée en moto (serait elle une influence d’Easy Rider ?) Ces gangs trafiquent dans la drogue, le vandalisme et les excès de conduite. Le concept de la moto est vraiment central, particulièrement au début de la BD et donne au story-telling la possibilité d’établir une scène urbaine (rue, bâtiments, autoroutes, espaces). Même si ce n’est pas l’élément fondamental de l’histoire, la moto de Kaneda a, aujourd’hui, atteint le statut d’icône.

Otomo est très connu dans le monde du manga pour sa maitrise du design mécanique. L’inspiration initiale de cette moto est issue des véhicules utilisés dans le film Tron (design de Syd Mead pour les connaisseurs). Otomo y a mis sa touche, réduit le chassis, collé quelques autocollants et surtout lui a donné cette couleur rouge qui lui va tellement bien.

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La drogue

Les pilules de Tetsuo

Beaucoup plus explicit dans la BD que dans le film, la consommation de pilules est très clairement affichée. D’abord dans le gang de Kaneda où on les voit en consommer et aussi en revendre. Et surtout dans l’auto-médication de Tetsuo et son incapacité à trouver une solution face à la mutation de ses pouvoirs. Les lecteurs comprennent que le gouvernement distribue une sorte de drogue capable d’augmenter l’énergie psychique et de donner des pouvoirs cinétiques. Pour les gens normaux, ces pilules seraient fatales. On voit aussi Tetsuo devenir le leader des « clowns » pour les vider de leurs stocks de drogue, censés calmer ses maux de tête.

Seul un personnage très intéressant et peu développé dans le film alertera Tetsuo sur ses excès de drogue. Lady Miyako le raisonnera finalement afin de libérer le pouvoir d’Akira, pouvoir qui le mènera vers une issue fatale.

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L’influence d’Akira

L'influence d'OTOMO sur ses contemporains

Ce frénétique cyberpunk animé a évidement influencé une quantité d’artistes depuis plus de 30 ans. Dans Stranger things, une enfant s’évade d’une structure gouvernementale et se découvre des pouvoirs surnaturels. Spielberg utilise la moto de Kaneda dans son Ready Player One. Rian Johnson, directeur de « The Last Jedi » utilise Akira dans son film « Looper ».

Le monde de la BD fut aussi très largement influencé par Akira. Otomo a, je pense, ouvert aux mangas les portes de l’occident. Mais surtout cet artiste a influencé ses contemporains comme Jeff Lemire (Descender), Cameron Stewart, Brenden Fletcher, et Babs Tarr (Motor Crush). Le succès des animés adultes comme Ghost in the Shell et Neon Genesis Evangelion a hérité du chemin tracé par Akira.

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Akira le manga

Akira, le manga en noir et blanc

Manga Cyberpunk japonais publié entre 1982 et 1990 dans le Weekly Young Magazine, Akira fut un succès immédiat au Japon. L’oeuvre comporte 120 épisodes et 2200 planches (Exercice périlleux pour résumer ça en 10 planches !). Exporté d’abord aux Etats Unis en 1988 dans sa version couleur, puis en France en 1990 par Glénat, la BD se servira de la notoriété occidentale du film pour accueillir cette nouvelle audience. La violence est brute, la pression sociale d’une vie d’après guerre est sans filtre, et la transgression du monde politique y est abordée sans hypocrisie.

La fougue de la jeunesse ainsi que la corruption et l’inefficacité du gouvernement militaire nous entrainent dans l’ère de la culture punk-rock japonaise.

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Akira le film

Akira le film

En 1988, alors même que la série BD d’Akira n’est pas encore fini, Otomo sort l’animé Akira. L’histoire est la même, mais pas la fin. Les personnages ne sont pas développés de la même manière. Pourtant, c’est bien le film qui va faire connaitre Akira au grand public. Un animé de science fiction sans compromis. Plus de 30 ans après sa sortie, je n’hésite pas à revenir dessus et me faire surprendre. Je ne suis pourtant pas un fan de manga, mais j’ai beaucoup de mal à trouver mieux dans le genre.

Le film a couté plus de 10 millions de dollars (un record pour un animé de l’époque), 327 couleurs dont 50 uniques, 160 000 dessins pour l’animation. Les films de ce genre au Japon étaient d’abord dessinés, puis animés et enfin la voix était posée. Pas pour Akira, Otomo a d’abord préféré travailler les voix puis adapter son dessin autour. Le tout accompagné par une musique envoutante…

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Etes vous un fan d’Akira ? Est ce la découverte manga de votre jeunesse ? Avez vous commencé par le film ou la BD ? Et surtout, cet article vous a t’il donné envie de revoir le film ou de dépoussiérer vos BD ?
N’hésitez pas à laisser des commentaires et à vous abonner !

Peioa

5 commentaires sur “Chef d’oeuvre de la BD – Akira en 10 Planches

  1. AKIRA est un incontournable pour tout fan de BD (peut importe le genre et le pays) tout comme le film.
    Incontournable aussi, le Manga post-apo, MOTHER SARAH édité chez Delcourt et dont Otomo est le scénariste et Takumi Nagayasu le phénoménal dessinateur !

  2. La BD m’avait mis une sacrée claque lorsqu’un ami me l’avait fait découvrir, vers milieu-fin des années 90, et de me rendre compte aujourd’hui que sa publication avait en fait commencé en 82 m’impressionne d’autant plus, tant il n’y avait rien de comparable dans le monde de la BD, et aujourd’hui encore je trouve que ça reste une œuvre à part.
    Ayant été déçu par d’autres adaptations avant de découvrir le film, je n’en attendais pas grand chose, mais celui-ci m’a aussi mis une claque, tant les dessins et le scénario étaient fidèles à la BD. Le film fait partie des meilleurs adaptations que je connaisse…
    Merci de m’avoir donné envie de redécouvrir le film autant que la BD !
    (et même si certains ont plus aimé que d’autres, je n’ai, moi non plus, jamais rencontré qqun qui n’a pas aimé Akira 😉)

  3. 10 planches et un article qui décrivent bien l’essence de ce chef d’oeuvre, bravo pour ce bon boulot.

    Personnellement j’ai vu l’animé avant d’acquérir les BD qui trônent fièrement dans ma bibliothèque. Akira c’est le genre de claque qui te fait passer du manga léger au manga qui rigole pas et qui te fait comprendre que tu es sur un chemin qui va te faire découvrir des oeuvres incroyables!

    Je suis allé revoir l’année dernière au cinéma la version mastered 4K, ils ont fait un boulot de dingue, c’était génial de le revoir avec une telle qualité sur écran géant.

    Katsuhiro Otomo a posé avec Akira des bases encore exploitées aujourd’hui, tant dans le scénario, le background que les dessins, un visionnaire avec 30 ans d’avance, merci à lui.

  4. Bonjour, je me permet quelques mot d’un amateur, je ne peut que valider cet article, Akira étant pour moi un fantastique chef d’oeuvre.

    Je vous conseille deux oeuvres dans la meme direction visuel mais sur des sujets différents :

    -Icare, one shot, par Jirô Taniguchi et (TADAMMM) Moebius.

    -Planetes, en 3 tomes de Makoto Yukimura.

    Vous ne serez pas déçu.

  5. Wouaw quel fameux boulot pour aussi bien retracer et résumer cette célèbre BD. Un regard passionnant sur le Japon de l’époque avec néanmoins une vision avant-gardiste qui m’a aussi beaucoup plu!

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